Bagarre générale au saloon
Attention à « ceux qui seraient tentés de tirer sur le pianiste » prévient M. Kampf dans le Rapport annuel de 2003 [1]. Cet avertissement, répété de vive voix aux actionnaires le 29 avril, concerne M. Hermelin, Directeur général du Groupe Capgemini.
Si l’on place l’expression dans son contexte d’origine, cela donne une drôle d’idée de l’ambiance du groupe :
Nous voilà donc transportés au Far-West, dans un saloon. Conformément à la tradition, le musicien local tape sur son piano-bastringue, tout en mâchant son cigare et en vidant des chopes. Tournant généralement le dos à la salle, il est complètement indifférent à tout ce qui peut s’y passer. Le Patron le paie [2] pour jouer quoiqu’il arrive, autant pour animer les lieux que pour couvrir les éclats de voix. Alors quand le ton monte un peu trop et que les revolvers apparaissent, le Patron a toujours les bons réflexes : il décroche le (précieux) miroir suspendu derrière le bar, et il protège son (cher) pianiste qui constitue une cible trop facile.
Voilà donc la vision que M. Kampf se fait de Capgemini ?
· Le Far-West : c’est bien vu. Dans le monde du business globalisé, les grands groupes montrent qu’ils sont capables de s’associer puis de s’entre-tuer pour un bon filon ou quelques kilos de pépites.
· Le saloon : sauf dans Lucky Luke, c’est quand même un lieu dangereux, où l’on peut prendre de mauvais coups. On y trouve des gens habitués à bosser dur dans des conditions pénibles, et qui peuvent déclencher une bagarre générale s’ils se sentent menacés ou maltraités….
· Le pianiste imperturbable qui donne le rythme, dans la confusion générale. Malgré les apparences, il est même capable de reconnaître les fausses notes :
« Les difficultés rencontrées dans deux de nos principales filiales, les Etats-Unis et la France, témoignent aussi des perturbations entraînées par l’acquisition en mai 2000 de l’activité consulting d‘Ernst & Young et le modèle opérationnel trop complexe, sinon confus adopté lors de la fusion[3]. »
… eh bien, puisque c’est le Patron lui-même qui suggère cette description, il doit savoir de quoi il parle ! q
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LETTRE OUVERTE AU D.R.H. DE CAPGEMINI FRANCE |
Délégués syndicaux SICSTI-CFTC de Capgemini Paris, le 10 mai 2004
Monsieur le Directeur,
Depuis le 10 décembre 2003 –soit déjà 5 mois aujourd’hui- nous n’avons pas eu le plaisir de vous rencontrer dans le cadre de vos fonctions d’animateur du dialogue social avec les organisations syndicales.
Au moment de cette dernière réunion, nous avions quelques thèmes de négociation en suspens, et un projet d’accord en bonne voie (Travailleurs handicapés).
Les réunions tenues en 2003 ne pouvaient pas suffire, loin s’en faut, à épuiser la liste des questions que nous voulions traiter (gestion des fins de carrière, transformation de certains aspects du travail comme la formation, les affectations, mobilité statut des élus...) ; mais les relations sociales continuaient malgré tout.
Cette année, le calendrier social est encore vide et semble devoir le rester, au moins jusqu’au moment d’établir le protocole des élections de janvier 2005.
Pourtant, plusieurs aspects de la vie sociale dans l’UES présentent un niveau de gravité proportionnel à la démotivation des salariés. Les Délégués CFTC ne comprennent pas le mutisme de la DRH dans ces circonstances.
C’est pourquoi nous avons choisi la voie judiciaire pour régler la question urgente des négociations sur les salaires. Nous espérons que ce vendredi 14 mai, la décision du Tribunal contribuera à instaurer une pratique normale de négociation salariale.
Pour ce qui concerne la structure et les métiers du Groupe, l’arrivée de Transiciel peut être l’occasion d’importants changements. Il convient donc d’avancer prudemment dans cette opération, et surtout de stabiliser l’existant avant de bouleverser encore l’environnement professionnel des salariés.
Or, la Direction générale refuse d’associer les représentants du personnel à la démarche de rapprochement entre Capgemini et Transiciel. Non seulement nous regrettons cette attitude, mais nous craignons que les négociations à peine entamées en 2003 n’aboutissent jamais, emportées par une nouvelle restructuration.
Nous espérons que ces craintes sont infondées. Nous en serons assurés quand nous recevrons de votre part une proposition de calendrier de négociations, reprenant les sujets laissés de côté il y a 5 mois.
Dans cette attente, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Directeur, l’expression de notre considération distinguée.
Les Délégués syndicaux CFTC de Capgemini